mardi 27 septembre 2011

Samedi 1er octobre 2011, Roma Pride !

Cet appel français pour la Roma Pride ("Dignité pour les Rroms") nous satisfait. Il clarifie plusieurs ambiguïtés. Pas toutes. Peu importe ! L'essentiel est dit. Notre Collectif ne peut que s'associer à cet appel qui n'est pas que français mais exprime, selon nous, le point de vue de Français solidaires des Rroms.

La manifestation annoncée en plusieurs pays d'Europe rejoint la campagne Dosta ("assez"). Nous sommes solidaires de tous les Roms d'Europe, membres ou non de l'Union européenne.


L’été 2010 et son cortège de discours agressifs envers les Roms et les Gens du voyage sonna pour beaucoup comme une remise en cause de principes qui nous sont chers : le respect de la dignité de chacun et l’égalité pour tous.

Depuis trop longtemps, de nombreuses confusions sont volontairement entretenues entre catégories administratives, nationales, culturelles et entre Roms, Tsiganes, Gitans et Gens du voyage. Celles-ci fabriquent, pour mieux la désigner, une population qui serait homogène et viscéralement dangereuse pour la République. Nous refusons ces confusions et nous dénonçons le racisme et les discriminations qui visent plus particulièrement les individus ainsi stigmatisés.

Depuis trop longtemps, les pouvoirs publics nationaux, en France comme ailleurs sur le continent, instrumentalisent la dimension européenne de certaines problématiques pour se défausser de leurs responsabilités sur d’autres pays, notamment la Roumanie et la Bulgarie, ou sur les institutions européennes. Celles-ci sont de plus incapables d’intégrer la réalité de la situation des Voyageurs français.

Nous refusons cette instrumentalisation et nous exprimons la solidarité européenne des sociétés civiles.

Cette solidarité, nous voulons la construire comme un moment d’engagement partagé entre Roms, Tsiganes, Gitans, Gens du voyage, antiracistes et plus largement tous les citoyens militants pour l'égalité des droits. Une solidarité dans laquelle les revendications particularistes – dont nous connaissons le côté étouffant – n’ont pas leur place. Une solidarité qui, au contraire, se fonde sur l’égalité des droits et le respect de la dignité qui doit être reconnue à chaque individu.

Au regard de ce qui nous guide, cette première « Roma Pride », organisée simultanément dans de nombreux pays européens, de la Norvège à la Roumanie et de l’Italie au Danemark, sera l’occasion, dans une ambiance citoyenne, festive et revendicative, de réclamer :

1/ Le respect pour tous les Européens de la liberté de circulation, un des fondements essentiels de la construction européenne. Ceci implique notamment l'intégration de la Roumanie et de la Bulgarie dans l'espace Schengen, ce qui leur est aujourd'hui refusé en particulier pour pouvoir mieux expulser les Roms.

2/ La suppression de la loi de 1969, qui dessine un véritable "Code du Voyageur", et dont les trois dispositions – les unes plus iniques que les autres - sont :

L'imposition d'une commune de rattachement pour les Voyageurs, avec un quota maximum de 3% de Voyageurs par commune.

Des modalités très restrictives d'inscription sur les listes électorales (qui ne peut intervenir qu’à l’issue de 3 ans de rattachement à une même commune).

La mise en place de titres de circulation, dont le carnet à faire viser tous les 3 mois en commissariat ou en gendarmerie.

Condamnée par feu La HALDE et même critiquée dans le récent rapport parlementaire du sénateur Hérisson, cette loi n’a évidemment plus sa place dans une République respectueuse du principe d’égalité et de sa Constitution.

3/ La reconnaissance de la caravane comme logement, et la réforme de la "taxe caravane", une taxe injuste puisque ne prenant pas en compte le niveau de revenus des Voyageurs qui y sont soumis.

4/ Le respect de la libre-circulation et du libre-stationnement pour les Gens du voyage, comme pour tous les autres citoyens, en particulier la possibilité de s'arrêter dans toutes les communes françaises. Ces droits sont aujourd’hui remis en cause puisque, en vertu notamment de la législation sur les aires de stationnement et en raison de la disparition des terrains municipaux ouverts au public, plus de 90% des communes sont interdites aux voyageurs, alors qu'une génération auparavant, il existait une possibilité de halte dans pratiquement tous les villages de France. Ces interdictions générales d’installation de caravanes doivent être proscrites dans les documents d’urbanisme des communes.

Pour nous, ces quatre revendications manifestent une volonté et un désir. La volonté de refuser que le mode de vie itinérant et l’habitat caravane soient réprimés dans notre pays. Le désir que le principe d’égalité ne soit pas une proclamation vide de sens pour une partie de nos concitoyens.

Le récent Sommet des maires pour les Roms et Gens du Voyage a conclu : « Nous affirmons de nouveau notre ferme conviction que l’avenir de la société démocratique européenne requiert l’inclusion et la participation de tous les Européens, y compris les Roms, à la construction de la démocratie et à la pleine vitalité de leurs collectivités, avec tous les droits et toutes les responsabilités que cela implique ».

C’est pour faire vivre cette Europe démocratique car débarrassée du racisme et des discriminations que nous nous retrouverons samedi 1er octobre pour la première Roma Pride.



jeudi 22 septembre 2011

La chasse à l'enfant

« Cet enfant a 11 ans, il vit en France depuis 5 ans. En 8 jours, il a été expulsé 4 fois de sa maison par la police. Il se déplace la peur au ventre, il ne va plus à l'école, il a perdu son sourire d'enfant, et son visage, déjà marqué par ces épreuves lui fait paraître des années de plus. Il est recensé, fiché, photographié et son ADN répertorié. »

La Roumanie n'est pas Auschwitz mais ici, pour les Roms, c'est déjà Vichy.

Blog Mediapart

22 Septembre 2011 Par philippe alain

Hier, 21 septembre 2011, ce sont encore 200 roms de l'agglomération lyonnaise qui ont été expulsés de leurs lieux de vie sur 4 camps. A Lyon, depuis une semaine, le préfet applique à la lettre la circulaire du 5 août 2010, pourtant illégale, et démantèle, un par un, tous les camps de Roms.

Il fallait voir ces 25 enfants, de l'autre côté du trottoir de la rue Eugène Pottier, le regard perdu, les yeux encore embués par le sommeil, ne comprenant pas pourquoi on leur envoyait une quinzaine de véhicules de police de si bon matin. Ils avaient entre 6 mois et 12 ans. L'un d'entre eux avaient son cartable sur le dos. Ce matin, il n'ira pas à l'école.

La veille, l'OFII de monsieur Klarsfeld était passé pour proposer « l'aide au retour ». Pas un habitant n'en n'a voulu. Stefan expliquait pourquoi :-

« Qu'est ce que tu veux que je fasse de cet argent pour retourner en Roumanie ? Je suis en France depuis 2002, j'ai 5 enfants qui vont à l'école, l'OFII ne m'a jamais proposé un centime pour m'aider. A la place, ils donnent 300 € à des Roumains qui sont là depuis une semaine et qui sont venus exprès pour ça... »

Le préfet du Rhône a déclaré qu'il ne voulait pas voir d'enfants mendier dans la rue. Il montre clairement aujourd'hui qu'il ne veut pas non plus les voir à l'école. A peine les enfants rentrés et scolarisés à un endroit, il les expulse et les rejette à l'autre bout de la ville. Le préfet du Rhône, reprenant les déclarations du ministre Apparu (2), à déclaré qu'à Lyon, il ne laisserait aucun enfant de moins de 10 ans dormir dehors. Rien qu'hier, il en a jeté une centaine à la rue dont les plus petits ont quelques mois. La semaine dernière, après avoir trouvé le camp de Saint Fons, vide, le préfet a donné des consignes pour traquer, harceler et pourchasser les Roms, à Saint Fons où qu'ils se trouvent. (A moins, que de tels agissements ne soient le fait de fonctionnaires particulièrement zélés qui agissent de leur plein gré). C'est ainsi qu'un groupe de 80 personnes dont une trentaine d'enfants se sont retrouvés à Chassieu, puis Décines, retour à Chassieu, Villeurbanne puis Vaulx-en-Velin.

A Chassieu, quand la police les a retrouvés dans une forêt au milieu de nulle part, ils ont été obligés de quitter les lieux. Ils faisaient 100 mètres, tenant d'une main leur enfant, de l'autre leur lourd baluchon, suivis à pied par des policiers. Dès qu'ils s'arrêtaient pour se reposer, la police les obligeait à repartir.Cette traque à durée 2 jours et 2 nuits.

Finalement, à Vaulx en Velin, alors qu'ils étaient exténués, au bord de l'épuisement, la police les a chassés une dernière fois... Pour les conduire dans une usine occupée par une trentaine de Roms...

Alors que depuis une semaine et le début des rafles, la police était passée dans tous les squats pour menacer d'expulsion immédiate tous les occupants s'ils accueillaient de nouvelles personnes, ici, la police a tenu le discours contraire. Un Rom ma raconté que la police les avait menacés d'expulsion immédiate s'ils n'acceptaient pas le nouveau groupe... Depuis le mardi 13 septembre et l'expulsion illégale des 140 personnes de la rue Marcel Mérieux (les premiers occupants étaient là depuis plus de 48 heures), le préfet à jeté dans la rue plus de 650 roms.

Mardi 20 septembre il en a expulsé par charter 150 dont une cinquantaine de Saint-Etienne. En ce qui concerne le respect de la loi, celle-ci est bafouée en permanence. A une personne qui s'étonnait de la loi qui interdit d'expulser les squateurs au delà de 48 heures de présence, un officier supérieur de police à répondu : « ne vous inquiétez pas, on ne les laissera JAMAIS s'installer 48 heures. Çà, c'est notre travail. »

La police ne laisse pas 48 heures, elle n'hésite pas à intervenir au bout de quelques heures sur des terrains privés sans l'accord du propriétaire, elle intervient même au bout de 96 heures, sans se gêner. En ce qui concerne les expulsions, la préfecture délivre maintenant des OQTF (Obligations de Quitter le Territoire Français) dès qu'un Rom qui a déjà vécu sur le sol français l'a quitté et revient. En gros, on supprime le droit de libre-circulation et on exclut les roumains de l'Europe. Bien entendu, ce n'est que pour les Roumains. Un touriste hollandais qui vient en caravane et multiplie les courts séjours, même s'il ne dépense rien en France, lui, ne sera pas inquiété... En ce moment la police multiplie les contrôles au faciès à l'encontre des Roumains. Qu'on ne me dise pas que ce n'est pas ciblé sur les roumains, les contrôles sont effectués avec un policier spécialement venu de Bucarest qui pose les questions et traduit...

Relevé d'identité, fouille des sacs, confiscation des portables pour vérifier s'ils ne sont pas volés et enfin, questionnaire rapide pour connaître la situation administrative et la date d'entrée en France. Le tout précieusement consigné dans un petit carnet spécial.

Parfois, dans la foulée, convocation à la PAF pour se constituer un dossier d'expulsion. Enfin, depuis longtemps déjà, la police arrête des enfants roms. Dans le métro, dans la rue, dans les déchetteries.

Voici le témoignage d'un enfant: - « Dans la déchetterie, il y avait un monsieur qui ressemblait à un clochard. Il fouillait dans les poubelles. Et puis d'un coup il a sauté la barrière et il nous a attrapés. Il a mis son bandeau de la police. Ensuite ils nous a amenés au commissariat. Ils nous ont pris les empreintes, comme ça, tous les doigts et aussi la main et puis ils nous ont pris des photos, 3 photos et après il nous a dit de cracher sur un mouchoir qu'il a mis sur la table. Après, ils nous ont mis en garde à vue, jusqu'à 11 heures du soir et puis ils nous ont emmené dans un foyer. Ils ont pas voulu prévenir mes parents.» Cet enfant à 11 ans, il vit en France depuis 5 ans. En 8 jours, il a été expulsé 4 fois de sa maison par la police. Il se déplace la peur au ventre, il ne va plus à l'école, il a perdu son sourire d'enfant, et son visage, déjà marqué par ces épreuves lui fait paraître des années de plus. Il est recensé, fiché, photographié et son ADN répertorié.

Alors je ne sais pas si la Roumanie c'est Auschwitz, monsieur Klarsfeld, mais je peux vous dire, et votre comparaison est à cet égard tout à fait bien trouvée, ici, pour les Roms, c'est déjà Vichy.

(1) 21 septembre 2011, Arno Klarsfeld, directeur de l'OFII (Office Français de l'Immigration et de l'Intégration) déclarait sur France Inter à propos des expulsions de roms : « S'il n'y a pas de politique du chiffre, c'est-à-dire s'il n'y a pas d'aiguillon sur les préfets, alors les préfets ne font pas ce travail de renvoyer, non pas vers la mort, non pas vers Auschwitz... »

(2) « Il est hors de question qu'une seule famille se retrouve à la rue. Un enfant ne dort pas dehors en France en 2011 » (B. Apparu, Le monde, 20 juillet 2011)« Jean-François Carenco s'est engagé à ce qu'aucune mère accompagnée d'enfants de moins de 10 ans ne dorme à la rue » (Le Progrès, 11 août 2011)

Source TERRA : http://blogs.mediapart.fr/blog/philippe-alain/220911/la-roumanie-nest-pas-auschwitz-mais-ici-cest-deja-vichy-1

Ils n'en peuvent plus. Et nous non plus !

Communiqué du 22 septembre 2011

Ils n'en peuvent plus. Et nous non plus ! C'est d'ailleurs le but recherché ! C'est une forme de guerre qui est faite aux Rroms du Val d'Oise, comme ailleurs. Et il n'y a pas de guerre sans mort. Une mort lente, peut-être, mais une mort sociale, sûrement. Quand on ne peut vivre nulle part, on est condamné à mort.

C'est donc reparti sur la Butte de Montarcy, à Méry-sur-Oise : expulsion, pluie d'OQTF, pressions exercées pour obtenir des retours « volontaires » en Roumanie... Partout, dans le Val d'Oise, Deuil, Montmagny, Saint-Ouen- l'Aumône, Méry-sur-Oise, de nouveau, comme ce fut le cas, par le passé encore proche, à Argenteuil, Sarcelles, Neuville-sur-Oise, Éragny-sur-Oise, Groslay... Toutes les tentatives des Rroms pour s'installer quelque part ont été vouées à l'échec.

Voilà donc des Européens interdits de séjour en Europe ! Voilà donc des familles, avec de jeunes enfants, personæ non gratæ (malvenues) chez nous, en France ! L'an passé, on a utilisé des rames de RER (en Essonne), il y a quelques semaines des tramways (en Seine-Saint-Denis), ces moyens de transport de la RATP, sans que le personnel concerné ait rien eu à dire, (réveillant, au passage, de sinistres souvenirs, ceux des rafles de 1942 !), afin d'« éloigner » les Rroms, et sans oublier de détruire, immédiatement, leur bidonville. On stresse, sciemment, ces familles en détresse, en les chassant, constamment, sans leur dire où aller, sinon là d'où elles se sont enfuis.

Quitte à rabâcher, à marteler, nous ne cesserons de demander : quelle est la part, fut-elle petite, de la misère du monde que nous acceptons, de prendre en charge ? Pas en en comptant sur la ville voisine pour faire ce que nous nous refusons à faire. Non ! En fixant des objectifs, limités peut-être mais précis, pour notre solidarité. Personne ne veut d'un bidonville ! Nous en avons connu de gigantesques au cours du siècle dernier. Ils ont été résorbés en logeant des Portugais, des Algériens, infiniment plus nombreux. Ce n'est pas en abandonnant une population qu'on supprime les bidonvilles. Pire : l'expulsion permanente engendre de la délinquance et tout le monde en souffre.

Politique à courte vue, impitoyable et stupide ! On mobilise de lourdes forces de police, sans résultat. On gâche l'argent public en payant des retours pour « faire du chiffre », mais les intéressés évidemment reviennent, pour les raisons qui les ont fait partir. On laisse nos semblables vivre dans des conditions indignes auxquelles, quoi qu'on entende dire, ils ne se résignent pas : sans eau, sans latrines, sans poubelles (ou, quand il y en a, très rarement ramassées !), sans scolarisation, sans suivi médical, sans ressources (autres que ce que procurent le travail au noir, la vente à la sauvette, la mendicité ou la rapine !). On taxe les contrevenants qui voyagent sans payer leur train, ou dans des véhicules en mauvais état. On s'acharne. On cherche à dégoûter, à écœurer, à endetter, à sanctionner toute conduite délictueuse..., et il n'est pas difficile d'en constater. Et tout cela, en vain. Aucune solution ne se trouve seulement dans la répression !

Comment sortir de cette impasse ? Les préfectures sont vivement incitées à ne rien passer aux Rroms. Le nouveau président de l'OFII, Arno Klarsfeld, vient de le reconnaître sans vergogne. Aucune politique d'accueil n'est envisagée. On tente de dresser les populations contre les occupants de ces bidonvilles qui, certes, nous font honte mais qui, même détruits, brûlés, éradiqués, sont tout de suite remplacés par d'autres bidonvilles, élevés à la hâte, pour survivre, se protéger de la pluie, du froid, du vent et... dormir.

Nous en appelons à l'intelligence de nos concitoyens. Oui, les Rroms, dans le Val d'Oise, en Ile de France, ont de très mauvaises conditions de vie. Mais faut-il encore les aggraver ? Où cela nous conduit-il ? Ne pleurons pas sur les morts dans des incendies, ou sur la détresse des enfants, en observant, passivement, un drame qui nous dépasserait. Nous sommes devant l'un des trous béants d'une politique désespérante. Ouvrons les yeux pour n'y pas chuter. Un monde sans hospitalité est un monde de haine. Avec les Rroms, nous résisterons.

Avec le soutien et la participation d’ASET 95, A.T.D Quart Monde,

la Ligue des Droits de l’Homme et le Secours Catholique.


mardi 6 septembre 2011

Enseigner le samudaripen !



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Luc Chatel dans le numéro du Monde du 6 Septembre 2011, invite Claude Lanzmann à « se rassurer » : « Ni le mot Shoah ni l’histoire de ce crime ne disparaissent de l’école, bien au contraire », affirme-t-il.

Le ministre de l’éducation nationale entend-il rassurer aussi une partie de son électorat ? Toujours est-il que son articlen’évoque pas une seule fois le sort des Tsiganes….

Il est vrai qu’il y a débat, du point de vue des intellectuels Juifs, sur une confusion qu’ils récusent : « les politiques visant les Juifs et le Tsiganes relèvent de deux logiques très différentes » estime Yannis Rodier, formateur au Mémorial de la Shoah (1). Plus précisément encore, l’historienne Annette Wiewiorka affirme :« les Tsiganes comme les Juifs ont été tués en famille, mais les procédures conduisant à la mort des Tsiganes sont radicalement différentes de celles menant à la mort des Juifs. »

Cette volonté de ne pas associer les Juifs et les Tsiganes dans le génocide perpétré par les Nazis, sous le couvert de distinctions fort discutables, - et que tous les Juifs n’approuvent pas ! - contient une discrimination, en fait ou en germe, particulièrement pernicieuse.

Doit-on se taire sur le génocide des Tsiganes ( sans z, s’il vous plaît) parce que lesvictimes de la Shoah ont été nettement plus nombreuses que les victimes du Samudaripen ? C’est inadmissible et insupportable !

Doit-on enseigner la Shoah et pas le Samudaripen parce qu’ily aurait une différence de nature entre l’Holocauste des Juifs et laDestruction des Tsiganes ? Même si les motivations du 3èmeReich ont pu être différentes, la volonté d’éradication totale des deux peuples a été la même. Plus aucun Juif, plus aucun Tsigane ne devaient survivre en Europe.

Le refus d’un mémorial commun à toutes les victimes du génocide proposé, en Allemagne, par Romani Rose, au nom des Sintis et Rroms d’Europe, relève de la même décision autant politique que philosophique : la Shoah ne saurait être confondue avec rien d’autre. L’extermination des Juifs et Tsiganes ensemble, à Auschwitz, ne permet pourtant pas que l’on mêle les victimes dans le même hommage. Comprenne qui pourra !

Distinguer n’est pas séparer. Dans les camps de la mort,Juifs et Tsiganes ne vivaient pas, certes, sauf exception, dans les mêmes baraques. Mais si l’on considère, à bon droit, que la Shoah attentait à l’humanité tout entière, on en peut dire autant du Samudaripen. Dans les deux génocides on trouve la même négation de l’homme, non conforme au modèle racial européen défini par les pseudo-doctrinaires du régime national-socialiste.

Il n’y a pas plusieurs racismes même quand le racisme se manifeste sous diverses apparences et frappe des populations différentes. Il ne convient pas de parler de « racisme et d’antisémitisme ». L’antisémitisme est un racisme ou, plus précisément l’une des formes du racisme. Juifs, Noirs, Roms… ont, souvent, les uns comme les autres, été victimes d’une hétérophobie haineuse conduisant au meurtre, voire à des tentative d’extermination. Faire de l’antisémitisme une particularité historique, c’est lui nier qu’il concerne chacun de nous. La Shoah et le Samudaripen appartiennent à l’histoire de tous les Hommes. On ne peut en« privilégier » aucune partie.

La romaphobie, l’antitsiganisme sont loin d’avoir disparu.Les Européens ignorent trop souvent que les Tsiganes ont, depuis des siècles,été chassés et pourchassés, tenus en esclavage, conduits aux galères, fusillésau fond des bois, traînés vers les fours crématoires.

Les Tsiganes, comme les Juifs, ont été niés dans leur êtremême. Longtemps « le fils du vent » et le « juif errant »ont fait route commune. Il est aussi une Shoah des Roms (un holocauste visant à l’éradication d’une populationdésignée pour l’anéantissement). Il est, oserai-je dire, un Samudaripen desJuifs (la destruction, jusqu’à sa racine, de l’Arbre de Judée). Ce ne sont pasles mêmes qu’on a exterminés, mais pour la même raison : ils ne pouvaientavoir la moindre place au sein du peuple allemand, comme du peuple européen.

Si l’on n’enseigne pas le Samudaripen, on masque une partiede l’histoire de l’Europe et si l’on enseigne la Shoah sans enseigner leSamudaripen, on crée une séparation qui nuit à l’histoire de la Shoah ! Pourquoiserait-il inadmissible d’oublier l’enseignement de la Shoah dans nosécoles et acceptable de ne rien dire du Samudaripen ? L’histoire des Roms commel’histoire des Juifs, font partie de l’histoire européenne, de notre histoire.

vendredi 2 septembre 2011

Marche pour la fierté

Pride, en anglais, signifie fierté. Les Rroms sont fiers d'eux-mêmes. Une initiative voit le jour. Elle vise à européaniser l'exigence du respect de ce peuple. Nous la faisons connaître.


Appel à une «Pride» européenne pour les Roms le 1er octobre

Par un collectif européen.

Il y a un an, de nombreux citoyens roumains et bulgares étaient brutalement expulsés de France parce que Roms. Ces actes de violences se déroulèrent sous l’œil des caméras de télévision mais dans l’indifférence quasi générale, non seulement des classes politiques, mais également des sociétés civiles européennes. Pour beaucoup, ces violences apparaissaient comme le dernier acte d’une tragédie que devraient fatalement subir les Roms à travers toute l’Europe depuis plusieurs siècles, tragédie dont les persécutions des nazis et de leurs collaborateurs ont constitué le paroxysme, mais pas la fin. Beaucoup se sont résignés à l’indifférence par lassitude, par manque de protection politique ou institutionnelle, par autoconviction que ces positions de dominés étaient acceptées voire désirées par les Roms eux-mêmes.

L’évocation de ces violences est pourtant insupportable : en Hongrie, manifestations des milices d’extrême droite dans les villages où vivent de nombreux Roms, comme à Gyöngyöspata, les obligeant à fuir. En République Tchèque et en Hongrie, assassinats et crimes racistes. Dans de nombreux villages, les Roms sont séparés du reste de la population par des murs construits par les autorités locales, comme à Tarlungeni ou Baia Mare en Roumanie, Michalovce, Košice, Prešov ou Svinia en Slovaquie, Sliven en Bulgarie… En Serbie, Croatie, Moldavie, France et Turquie, violentes discriminations raciales dans tous les secteurs de la vie. Retours forcés au Kosovo et expulsions d’Allemagne, du Danemark et de Suède, etc. Cette funeste liste pourrait s’allonger indéfiniment, si bien que les sentiments de fatalité et d’impuissance, voire de normalité de la violence subie l’emportent parfois, même chez certains d’entre nous.

Ces sentiments sont similaires à ceux qui avaient gagné les membres de la communauté gay américaine jusqu’à la fin des années 60. Ils s’étaient habitués aux représentations dégradantes, à la condition de marginalité, à ne pas jouir des mêmes droits que les autres citoyens et à subir régulièrement des violences, individuelles comme policières, simplement parce qu’ils étaient gays. Le 29 juin 1969, suite à la descente policière du jour au Stonewall Inn, petit bar gay du quartier de Greenwich Village à New York, une poignée d’habitués, rejoints par quelques habitants du voisinage, ont décidé de dire «Assez !». Après quatre jours de confrontations avec la police, quelque deux milles personnes ont organisé une marche dans les rues de la ville : la Gay Pride était née.

Un an après l’affirmation d’une politique anti-Roms délibérée en France, quelques jours, mois ou années après les insupportables violences racistes subies par les Roms sur tout notre continent, le samedi 1er octobre sera le «Stonewall rom européen». Ce jour-là, nous, responsables de la société civile européenne antiraciste et rom, allons assumer nos responsabilités et crier avec force et détermination: «Dosta !», «Assez !». Avec fierté et espoir en une Europe débarrassée du racisme, de l’antisémitisme et de toutes les discriminations raciales, nous allons marcher pour la première Roma Pride.

Nous en avons assez des stéréotypes racistes, assez des discriminations raciales permanentes, assez de la marginalisation forcée, assez des violences quotidiennes, assez du statut de bouc émissaire, assez des meurtres racistes qui touchent les individus ou communautés roms au cœur de notre continent depuis trop longtemps, assez !

Ensemble, avec de nombreuses organisations de la société civile, des citoyens engagés célèbres ou anonymes, puissants ou faibles, nous allons défiler au cœur des capitales européennes pour faire mieux connaître et pour dénoncer le racisme et les discriminations raciales dont sont victimes les Roms, aujourd’hui, à travers toute l’Europe. A l’occasion d’événements culturels, nous partirons à la rencontre de tous ceux qui souhaitent mieux connaître la diversité des cultures, des identités, des histoires et des mémoires roms, bien loin des stéréotypes et clichés éculés. Par notre action commune, nous ferons vivre le rêve européen et la valeur d’égalité qui le fonde. Notre revendication sera donc simple et claire : l’égalité des droits et l’égale jouissance des droits pour tous les individus vivant en Europe. En un mot, la dignité.

Ainsi, nous mènerons une coalition européenne de solidarité et d’idéal de la Norvège à la Turquie, de la France à la Lettonie, en passant par la Roumanie, la Hongrie, la Bulgarie et bien d’autres pays européens pour clamer haut et fort : Roma Pride !

Signataires :

Benjamin Abtan, Secrétaire Général du European Grassroots Antiracist Movement - EGAM, et les dirigeants d’organisations roms et antiraciste de 21 pays européens :

Albanie : Aldo Merkoci, Président de MJAFT ! Movement et Adriatik Hasantari, Président de Roma Active

Allemagne :Serdar Yazar, Membre du Bureau de la Turkish Union in Berlin- Brandenburg (TBB)

Autriche : Barbara Liegl, CEO de ZARA, Alexander Pollak, Directeur Exécutif de SOS Mitmensch et Andrea Härle, Directeur Exécutif de Romano Centro

Belgique : Patrick N’Siala Kiese, Membre du Bureau de Kif Kif Bulgarie : Krassimir Kanev, Président du Comité Helsinki et Deyan Kolev,

Président du Centre Amalipe pour le dialogue interethnique et la tolérance Croatie : Mario Mazic, Directeur de Youth Initiative for Human Rights - Croatia

Danemark : Thomas V. Lytken Larsen, Président de Center for Positive Integration - CePI, Anne Nielsen, Présidente de SOS mod racism et Sofie Amalie Andersen, Présidente de Nyt Dansk Romanetværk

Finlande : Janette Grönfors, Coordinatrice de Rasmus, réseau contre le racime, et Membre fondatrice de Nevo Roma

France : Dominique Sopo, Président de SOS Racisme et Eugène Daumas, Président de l’Union Française des Associations Tsiganes - UFAT

Grande-Bretagne : Samuel Tarry, Directeur de la campagne ‘Hope not hate’ de Searchlight

Hongrie : Janos Farkas, Président du Gouvernement de la minorité Rom de Gyöngyöspata et Erika Muhi, Directrice de NEKI

Italie : Angela Scalzo, Président de SOS Razzismo et Olga Bala, Présidente de Partita Romilor

Kosovo : Raba Gjoshi, Directrice de Youth Initiative for Human Rights - Kosovo et Osman Osmani, Directeur de Initiative 6

Lettonie : Anhelita Kamenska, Directrice du Latvian Centre for Human Rights

Moldavie : Nicolae Radita, Président du Roma National Center

Monténégro : Boris Raonic, Directeur de Youth initiative for Human rights Montenegro

Norvège : Kari Helene Partapuoli, Directrice du Norwegian Center Against Racism

Roumanie : Margareta Matache, Directrice Exécutive de Romani Criss

Serbie : Jovana Vukovic, Coordinatrice du Regional Centre for Minorities et Maja Micic, Directrice de Youth Initiative for Human Rights - Serbia Slovaquie : Irena Bihariova, Présidente de Ludia proti rasizmu (People against racism)

Turquie : Selda Bilocer, Président de Roma Youth Association et Cengiz Algan, porte-parole de Durde !

http://www.liberation.fr/monde/01012357463-appel-a-une-pride-europeenne-pour-les-roms-le-1er-octobre